La théorie économique a tendance à négliger l’impact du commerce sur le chômage.
Un tel silence contraste avec la crainte générale que la mondialisation ne détruise immédiatement beaucoup d’emplois.
Ce genre de hiatus fait tout l’intérêt du travail de Pushan Dutt, Devashish Mitra et Priya Ranjan (2009).
On y trouve 2 principaux résultats empiriques (92 pays, années 90):
- Plus de protectionnisme=plus de chômage. Une augmentation d’1% de la protection tarifaire s’accompagne d’un accroissement de 0,35% du taux de chômage. Les différences de régime commercial expliqueraient entre 20 et 49% des écarts de taux de chômage. Les auteurs maintiennent leur résultat après avoir invalidé l’hypothèse, a priori recevable, selon laquelle un chômage élevé fait le lit des pressions protectionnistes et accroît le coût politique du libre-échange (hypothèse d’endogènéité).
- La libéralisation commerciale crée immédiatement du chômage. En moyenne, les politiques d’ouverture commerciale se traduisent, dans les 12 mois, par un accroissement du taux de chômage de 0,6%. Au cours des deux années suivantes, les créations d’emplois compensent très largement les pertes instantanées.
Les auteurs déduisent d’un modèle théorique deux effets opposés sur l’emploi:
- L’effet Ricardo ou de spécialisation sectorielle: le commerce est riche en emplois puisqu’il dirige les ressources productives vers les secteurs qui sont les plus productifs et dont le prix relatif à tendance à progresser.
- L’effet dotations factorielles ou d’économie du facteur rare: dans un pays relativement riche en capital, le commerce a tendance à provoquer du chômage puisqu’il s’accompagne d’une diminution de la demande du facteur rare (le travail), dans tous les secteurs de production.