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Le capitalisme sans rival

« Le capitalisme sans rival » de Branko Milanovic est un livre qui a suscité beaucoup d’intérêt et de réactions. Connu pour ses travaux dans les domaines de l’économie internationale, de l’économie du développement et des inégalités, l’auteur offre à ses lecteurs une oeuvre relativement personnelle et un brin provocatrice.

L’auteur convoque avec brio les « incontournables » que sont Weber et Marx, Smith et Mandeville, Arrighi et Lénine, Schumpeter et Fukuyama afin de traiter de vastes questions d’économie politique telles que la place du communisme dans l’avènement du capitalisme planétaire ou bien l’articulation de la démocratie et du capitalisme.

Résolument critique envers l’Occidentalo-centrisme des grands récits libéraux ou marxistes, Branko Milanovic nous invite à penser le changement social à partir du point de vue chinois ou malaisien. Ce parti pris anti-impérialiste fort justifié conduit parfois l’auteur à quelques excès.

Le capitalisme et rien d’autre

Branko Milanovic affirme que la suprématie mondiale du capitalisme est un fait accompli et que la prophétie de Karl Marx et de Friedrich Engels est réalisée puisque le mode de production capitaliste et sa structure anthropologique s’imposent urbi et orbi.

Depuis la chute du communisme et le déclin des religions, plus rien ne s’opposerait à la triple marchandisation des moyens de production (travail, capital, nature), du politique (corruption) et de la vie privée (atomisation, externalisation du travail domestique, Airbnb). Plus un seul domaine de l’existence humaine ne serait épargné par l’impérialisme marchand. Comme Max Weber, l’auteur s’en désole, mais ne voit aucun moyen d’enrayer le processus.

Le constat général de l’auteur n’a en soi rien de nouveau.

Dans les années soixante et soixante-dix du siècle précédent des auteurs comme Guy Debord ou Cornelius Castoriadis dénonçaient l’impérialisme du Capital par delà les nuances Est-Ouest. L’apport de Branko Milanovic réside dans la forme d’admiration qu’il nourrit vis-à-vis des pays non Occidentaux dont la double révolution nationale et sociale des temps décoloniaux fut le levier de leur émancipation puis d’un « printemps » des forces productives à l’échelle de la planète. Même s’il s’en défend, il souffle sur l’ouvrage de Branko Milanovic un vent téléologique qu’on croyait disparu depuis Fukuyama ou Huntington…

Le communisme, outil inconscient du capitalisme

Pour que le capitalisme devienne hégémonique, l’économie socialiste et l’idéologie communiste devaient disparaître.

Toutefois, il faut penser cette substitution de manière dialectique. D’un côté, le communisme a détruit les obstacles au dévéloppement endogène que constituaient le colonialisme et l’impérialisme. D’un autre côté, l’essor des forces productives impliquait le dépassement du communisme.

Médiateur évanescent du capitalisme, le communisme réel a du s’imposer contre une certaine orthodoxie marxiste. L’auteur salue l’audace de Lénine et de Mao qui, selon lui, ont rompu avec la doxa socialiste qui ne concevait pas que la révolution socialiste puisse s’affirmer hors des pays européens les plus avancés. D’après les théoriciens de la IIième Internationale, le socialisme n’avait pas la moindre chance de succès dans les pays semi-féodaux où dominaient la paysannerie et la bourgeoisie commerciale. A ce titre, les révolutions anti-impérialistes du Sud sont des révolutions contre le marxisme occidental.

Bien que convaincant dans l’ensemble, le propos manque d’un peu de nuance.

En effet, il aurait été juste de rappeler que les communistes chinois ont trouvé une inspiration dans le chapitre final du Manifeste du parti communiste (1848) où nous lisons que la tâche des communistes en Pologne est de soutenir « le parti qui voit dans une révolution agraire la condition de la libération nationale, c’est-à-dire le parti qui déclencha en 1846 l’insurrection de Cracovie« . Un autre écrit de Marx, Le mouvement révolutionnaire, publié le 1er janvier 1849 dans la Neue Rheinische Zeitung pose le problème de la révolution socialiste en termes assez proches de la conception anti impérialiste qui était celle de Lénine et Mao : « L’Angleterre domine le marché mondial et la bourgeoisie domine l’Angleterre. La vieille Angleterre ne sera renversée que par une guerre mondiale qui seule peut offrir aux chartistes et au parti ouvrier organisé les conditions d’un soulèvement victorieux contre ses oppresseurs gigantesques (…) Elle sera menée au Canada comme en Italie, dans les Indes Orientales comme en Prusse, en Afrique comme sur le Danube ». Du reste, lors de la conférence internationale de Bakou en 1921 à laquelle l’auteur fait très justement allusion, Zinoviev se référa à ces écrits de Marx afin d’étayer le programme de la IIIième internationale.

Branko Milanovic a parfaitement raison de rappeler que les conditions historiques dans lesquelles se trouvaient les pays assujettis ne leur permettaient ni d’attendre les bras croisés la modernisation spontanée de leur pays ni d’imiter la tactique de la social-démocratie allemande. Mais la difficulté spécifique que le socialisme rencontrait en Russie ou en Chine (classe ouvrière minoritaire, retard technologique, Etat relativement faible) ne créait-elle pas les conditions d’une dégénérescence bureaucratique ultérieure de ces expériences révolutionnaires et n’est-ce pas en réaction contre ce risque que Mao déclencha la révolution culturelle qui provoqua un tel chaos que le parti communiste chinois fut obligé de procéder par la suite à des réformes économiques radicales? Les tâches spécifiques de la révolution socialiste dans les pays du Sud (accomplir la révolution bourgeoise à la place de la bourgeoisie nationale défaillante) ne débouchaient-elles pas forcément sur un mode de production amené à durer plutôt qu’à s’estomper au profit du communisme?

Les travaux de Lucien Bianco, en particulier l’ Essai de définition du maoïsme (1979) aurait apporté de l’eau au moulin ironique et paradoxal de l’auteur. Ajoutons au débat un papier de Daron Acemoglu (The future of chinese growth: institutional perspectives) qui prend en compte l’effet tabula rasa de la révolution culturelle sur la libéralisation économique décidée par Deng Xaioping.

Péremptoire, Branko Milanovic arrive à la conclusion que le communisme appartient désormais à l’Histoire. Cet enterrement de première classe du communisme, aux accents schumpeteriens (le communisme détruit le féodalisme puis crée la base productive du capitalisme ) fera grincer des dents.

Il est vrai qu’en définissant le capitalisme par le règne de la marchandise et de l’échange plutôt que celui de l’exploitation de la force de travail, l’auteur écarte l’hypothèse révolutionnaire chère à Marx (chapitre 5, 5.2.b), au risque de s’enfermer dans une forme de pessimisme.

Adam Smith à New York, Bernard Mandeville à Pékin

La thèse centrale de l’ouvrage est que les anciennes colonies ou régions dominées par l’Occident (Chine, Vietnam, Algérie, Laos, Malaisie, Singapour, Botswana etc. ) ont donné naissance à une capitalisme authentique, cohérent, décomplexé, dépourvu du voile de sentimentalité écolo-libéral-méritocratique dont le capitalisme occidental aime (encore) à s’entourer.

Le capitalisme sans rival fait de la Chine contemporaine l’archétype du capitalisme politique, variante du mode de production dominant caractérisée par un dynamisme économique sous direction étatique.

Plus précisément, le capitalisme politique se manifeste par un pouvoir dictatorial et technocratique qui, bien qu’il permette aux élites économiques et politiques de fusionner, maintient l’ascendant de l’Etat sur l’économie et offre à la population un haut niveau de croissance des revenus qui légitime le pouvoir en place.

Soucieuses de la grandeur nationale, de l’indépendance du pays et de l’unité d’action, les élites dirigeantes du capitalisme politique peuvent être qualifiées de nationalistes. A ce propos, on regrette que l’auteur n’évoque pas les réussites des nationalismes non communistes, tels que ceux de Turquie, de Corée du sud ou d’Inde, qui sont peut-être eux-mêmes les cousins éloignés du volontarisme économique de Bismarck ou de Napoléon III.

Mais prendre en exemple la Chine devient problématique lorsqu’il s’agit de défendre bec et ongles le récit que les autorités chinoises font de leurs réalisations.

C’est ainsi qu’on est surpris de lire que si la corruption est importante en Chine (et l’auteur le regrette), ce serait à cause de la globalisation et du capitalisme en général et que le seul moyen d’y porter remède serait de procéder à quelques purges exemplaires.

De la même manière, rationaliser l’autoritarisme du régime de Chine au prétexte que « l’homme n’est pas un animal politique » au sens d’Aristote plonge le lecteur dans la perplexité. En effet, si l’on peut comprendre qu’il soit difficile de rassembler formellement les citoyens chinois sur une agora pour qu’il délibère chaque jour, on ne voit pas pourquoi ceux ci refuseraient le droit d’être consultés pour arbitrer entre des options politiques différentes.

On retrouve une démarche identique dans le chapitre que l’auteur consacre à la question des migrations et dans lequel il préconise de concilier internationalisme et protection des citoyens nationaux en ouvrant les frontières aux migrants qui accepteraient de ne pas bénéficier des mêmes droits politiques et sociaux que les natifs. Branko Milanovic se défend de faire la promotion de la politique migratoire discriminatoire de certains Emirats du Golfe. Mais sa recommandation politique ressemble fort au régime chinois du hukou qui entretient un dualisme de l’emploi entre les travailleurs d’origine rurale et urbaine. Alors que la Chine semble se diriger vers une réforme de ce statut, on fera remarquer que le modèle républicain traditionnel français instauré à la fin du XIXième siècle offre une voie d’accès progressive à l’égalité des droits politiques et économiques, via la législation du droit du sol.

Clair, désenchanté et ironique, riche en graphiques et statistiques dont l’auteur a le secret, le livre contribue au débat sur le capitalisme et apporte des préconisations progressistes en matière de fiscalité, d’éducation ou d’encadrement du financement des campagnes électorales qui interdisent de classer l’auteur parmi les conservateurs non éclairés.

Denis Gouaux

Les coûts cachés de l’hyperexportation chinoise

pureexporter

Le haut niveau d’extraversion de l’économie chinoise s’incarne dans une multitude d’entreprises au profil atypique,  tournées quasi entièrement vers la conquête des marchés extérieurs.

Le graphique ci-dessus est édifiant:  33% des entreprises chinoises exportent plus de 90% de leur production, contre 1,9% des entreprises françaises.

Fabrice Defever et Alejandro Riano ont exploré l’univers de ces exportateurs purs.

Leur très intéressant papier montre que ces entreprises, souvent à capitaux étrangers,  bénéficient du soutien  des autorités, qui leur accordent ici une subvention, là une  exemption de droit de douane sur les inputs importés, ou bien un accès préférentiel aux terrains ou aux logements.

Or, l’exportation à marche forcée n’est pas forcément un bien, nous expliquent  les auteurs.

En effet, poussée à l’extrême, la mondialisation rejoint le protectionnisme dans ses effets négatifs sur la productivité et la concurrence.  C’est ainsi que les exportateurs purs sont moins productifs que les firmes qui exportent avec modération et qui ne bénéficient pas des largesses de l’Etat. Qui plus est,  détourner  la production vers l’exportation limite la concurrence sur le marché intérieur et permet à des entreprises peu productives de survivre. D’après les auteurs, l’excès d’exportation représenterait un coût économique équivalent  à 3% du revenu réel chinois.

Dans ce contexte, les auteurs nuancent les effets positifs de la  libéralisation commerciale depuis l’adhésion de la Chine à l’OMC.

Le bloc Renminbi est là

5 ans après le déclenchement de la crise des « subprimes’, la devise chinoise a gagné en influence.

D’après les estimations de Martin Kessler et Arvind Subramanian, le cours des devises de l’Indonésie, de la Corée du Sud, de la Malaisie, de Taïwan, des Philippines et de la Thaïlande est désormais étroitement relié à celui de la devise chinoise, que ce soit sous l’influence des gouvernements respectifs  de ces pays ou des forces de marché.

La monnaie chinoise devient la monnaie de référence en Asie de l’Est, au détriment du dollar et de l’euro. Le billet vert ne donne plus le « la » qu’aux monnaies de Hong-Kong, du Vietnam et de la Mongolie

Qui plus est, le Renminbi étend son influence sur le  Chili,  l’Inde et Israël, tandis que, progressivement, la Turquie et  l’Afrique du Sud entrent à leur tour dans la danse.

La force d’attraction de la devise chinoise ne tombe pas du ciel puisque l’indicateur de « co-mouvement » entre une devise et le Renminbi augmente avec la part du commerce bilatéral (cf graphique ci-dessus). En se rattachant avec la monnaie chinoise, un pays cherche à stabiliser la valeur des achats et des ventes qu’il réalise avec l’Empire du Milieu.

Compte tenu de la montée en puissance du commerce extérieur chinois, les auteurs pronostiquent qu’en 2030 le degré de « co-mouvement » moyen entre les devises de 52 pays et le Renminbi équivaudra à celui qui les reliera au dollar.

Démocratisation, biens publics et redistribution: le cas chinois

Depuis le milieu des années quatre-vingts, les Chinois élisent leurs représentants de village.

Ces élections valent ce qu’elles valent, mais le principe d’un contrôle des représentants locaux par la population est acquis.

Une étude conduite par Monica Martinez-Bravo, Gerard Padro, Nancy Qian et Yang Yao, sur un échantillon de 217 villages dans 29 provinces, tend à démontrer que ces élections ont permis aux habitants de mieux faire entendre leurs préoccupations matérielles.

D’une part, l’offre de services collectifs a nettement progressé (écoles primaires, infrastructures sanitaires, irrigation…).

D’autre part, ces services ont été financés par des taxes locales.

Enfin, les élections ont provoqué une redistribution significative des revenus au profit des habitants les plus modestes, en particulier lors de l’attribution des terres.

Les auteurs se félicitent que l’amorce d’élections démocratiques ait accru la production de biens publics.

Contrairement à certaines craintes, l’implication populaire ne s’est pas traduite pas la dilapidation des fonds publics.

Ce résultat confirme l’intuition de Tocqueville qui, bien que critique vis-à-vis de la démocratie, lui reconnaissait tout de même la vertu d’améliorer  le sort du plus grand nombre.

La révolte des villageois de Wukan, qui ont imposé leurs candidats contre ceux du parti  communiste qu’ils accusaient d’accaparer les terres,  indique que ces élections créent des attentes qui ne peuvent être durablement ignorées.

Les Etats-Unis font condamner la Chine par l’OMC

Pour s’assurer d’être réélu, Barack Obama multiplie les appels du pied à l’électorat populaire en jouant sur la fibre protectionniste.

Dans sa ligne de mire, la Chine.

L’administration américaine a ouvert plusieurs conflits commerciaux à propos des éoliennes, de l’acier, des terres rares et maintenant des automobiles.

La plupart du temps, elle s’attaque aux barrières commerciales qui freinent les exportations américaines et plutôt que d’agir unilatéralement,  les Etats-Unis portent plainte auprès de l’Organisation internationale du commerce (Bloomberg Businessweek, 05/07/12).

Le plus souvent, les Etats-Unis obtiennent gain de cause.

Par exemple, aux yeux de l’OMC, une règlementation chinoise en contenu local discriminait les ventes américaines d’éoliennes. En juin dernier, l’OMC a désavoué les représailles tarifaires engagées par la Chine à l’encontre de l’acier américain.

Tout cela a du bon, puisque la première puissance économique mondiale joue le jeu du droit international, plutôt que de résoudre seule ses différends commerciaux.

Ajoutons que cette guérilla juridique se substitue à un conflit plus global, celui qui porte  sur  la sous-évaluation du Yuan vis-à-vis du Dollar, qui échappe aux prérogatives de l’OMC.

L’appréciation du yuan dope la productivité chinoise

Contrairement à une idée répandue, la Chine a abandonné depuis longtemps sa stratégie  de dumping monétaire.

Depuis 1994, date à laquelle la Chine a arrimé sa monnaie au dollar, le taux de change effectif réel du Yuan a progressé de 58%.

Cela signifie que vis-à-vis de ses principaux partenaires, la compétitivité-prix de la Chine se dégrade et que l’augmentation relative des prix  chinois a effaçé une part de la dégringolade des années 1979-1993 (-73%).

L’étude de Sylviane Guillaumont Jeanneney et Ping Hua (Revue d’Economie Politique, juillet-août 2001)  est d’autant plus intéressante qu’elle relie l’appréciation du Yuan Renminbi à l’amélioration du rendement de la main d’oeuvre chinoise (+8,3% par an depuis 1994).

Deux principaux canaux de transmission:

  • La production étant vendue plus cher, les salaires augmentent, ce qui incite à travailler mieux et à se former.
  • Les biens d’équipement importés sont moins onéreux en monnaie locale, ce qui permet d’utiliser à meilleur prix les technologies étrangères.

Subtilement, la Chine freine l’appréciation du Yuan pour que le coût immédiat de cette stratégie  (coup de frein sur les exportations) ne déborde point ses  bénéfices à moyen long terme.

Petit à petit, le Renminbi fait son nid

Les autorités chinoises expérimentent la constitution d’un marché offshore de leur monnaie nationale.

On commence à émettre quelques obligations libellées en Renminbi, la devise entre comme instrument de réserve dans les comptes  de quelques banques centrales et les pays du Sud sont invités à accepter la monnaie chinoise pour facturer leurs échanges avec l’Empire du Milieu.

Le but de l’opération n’est pas de détrôner  le dollar. Il s’agit plutôt de limiter l’accumulation de réserves de change et d’importer la politique monétaire américaine.

Prélude au flottement de sa devise, l’opération préfigure, peut-être,  le recentrage de l’économie chinoise sur sa demande interne et la fin de la surconsommation américaine.

DG

Chine, puissance économique dominante en 2030?

La Chine raflerait aux Etats-Unis le statut d’économie dominante en 2030.

C’est la prédiction  d’Arvind Subramanian, qui s’appuie sur un indicateur de pouvoir économique qui combine les parts de chaque pays dans le PIB mondial, le commerce et les investissements internationaux.

En 2030, la Chine aurait un poids économique identique à celui de l’Angleterre en 1870, ou celui des Etats-Unis en 1973.

3 forces propulsent l’Empire du milieu: la démographie, le rattrapage et la gravité.

La gravité signifie la capacité d’une grande économie à aimanter les échanges commerciaux:

That projection relies on the “gravity” model of trade, which assumes that commerce between countries depends on their economic weight and the distance between them. China’s trade will outpace America’s both because its own economy will expand faster and also because its neighbours will grow faster than those in America’s backyard.

Depuis l’année dernière, d’après l’indicateur indiqué,  Chine a plus de poids  que la France, l’Allemagne et le Japon.

Bien sur, cette puissance reste un peu nominale, tant que la productivité et le niveau de vie moyen restent inférieurs aux standards internationaux.

Mais au rythme de croissance de 5,5% par an, pendant deux décennies, le PIB par habitant devrait rattraper celui des européens.

DG

Chine: la démocratie est-elle au bout du PIB?

Dani Rodrik pose une bonne question dans son blog: un pays peut-il être riche et non démocratique?

En général, richesse économique rime avec bons scores démocratiques.

La Chine fait partie des rares pays autoritaires, de plus d’un million d’habitants et non dépendants des exportations de pétrole, qui dépassent les 5000 dollars par habitant.

Vers où ira la Chine?

A-t-elle un devenir Singapour, Belarus ou bien Jordanie et Tunisie?

DG

Qui détient la dette publique américaine?

Le New York Times du 19 juillet publie la répartition des acheteurs non résidents de titres de dette publique américaine.

La Chine détient 26% de la dette offshore, ce qui représente  8% de la dette totale.

Le graphique ci-dessous dévoile la répartition tripartite de la dette US: 36% aux résidents américains, un tiers à des administrations publiques locales, 31% aux non résidents.

La France vend autant à la Chine qu’elle lui achète

Les chiffres du commerce extérieur révèlent, qu’en 2009, les entreprises françaises ont vendu à la Chine 28 milliards d’euros de marchandises.

8 milliards ont été exportés depuis notre pays.

20 milliards supplémentaires ont été vendus par les 1800 filiales françaises qui sont installées en Chine.

De son côté, la République populaire a exporté 28 milliards de marchandises vers la France.

Un point partout la balle au centre?

Pas tout à fait, car il serait bon pour l’emploi français que nous exportions plus.

En revanche, ceux qui pensent qu’en cas de conflit commercial, la Chine ne disposerait pas d’un pouvoir de rétorsion à notre encontre, se trompent.

DG

L’argent caché des Chinois

La Chine est plus riche qu’on ne le pense, mais cela ne concerne pas tous les chinois.

En raison d’une sous déclaration massive des revenus immobiliers, spéculatifs et autres second emplois,  les statistiques officielles ne donneraient pas une image correcte du revenu disponible des ménages.

Le Crédit Suisse a demandé au professeur Wang Xiaolu (China Reform Foundation)  d’évaluer le revenu réel de la population chinoise.

Les conclusions de cette étude, réalisée  par le truchement de sondages officieux, sont détonantes (un résumé en français est accessible ici).

  • La masse des revenus cachés avoisinerait 10% du PIB chinois.
  • Le dixième le plus riche de la population capte 60% des revenus souterrains.
  • Grâce à ces fonds,  les ménages très aisés disposeraient de revenus annuels trois plus importants que les chiffres officiels.

Résultat: tandis  que les ménages les plus pauvres s’endettent pour subvenir à leurs besoins (cf le graphique ci-dessous où l’on observe une épargne négative pour les plus modestes), les plus riches épargnent plus de la moitié de leurs revenus.

Il est vrai que cette manne contribue à maintenir un bon rythme de consommation parmi les classes moyennes et supérieures, y compris en période de crise économique.

Mais il est évident que le recentrage de la Chine sur son marché intérieur s’accompagnera d’une profonde modification de la hiérarchie des revenus.

DG

12%

Depuis un an, les producteurs européens de papier ont multiplié les plaintes contre leurs concurrents chinois.

12%, c’est le taux maximum des droits compensateurs (antisubvention) que l’UE appliquera pendant cinq ans aux importations de papier glacé chinois.

Ces tarifs se doublent de droits antidumping (de 8 à 35%), auxquels la Chine répliquera, à n’en pas douter.

Les autorités de ce pays affirment de pas soutenir leurs firmes et ont riposté par des droits antisubvention d’un montant similaire, appliqués aux exportations européennes d’amidon.

Même si les producteurs italiens, espagnols ou belges font face à une pression concurrentielle croissante, le montant des exportations chinoises (130 millions d’euros) reste modeste.

La décision de l’UE est stratégique.

C’est la première fois que l’UE associe tarifs antisubvention et antidumping à l’encontre de producteurs chinois spécifiques.

En portant le débat sur le terrain de la concurrence déloyale et non celui de la sous évaluation du Yuan, l’UE cherche à ne pas diviser ses Etats-membres.

Comme l’explique le New York Times, beaucoup de pays européens voient leur déficit commercial se creuser vis-à-vis de la Chine, alors que l’Allemagne enregistre un excédent.

Au passage, les sanctions de l’UE amélioreront les relations commerciales avec  l’Afrique du Sud, pays exportateur de papier qui avait déposé plainte contre la Chine et pourrait bénéficier de ses mésaventures.

DG

La géographie au service des délocalisations vers la Chine

Bas salaires, monnaie sous-évaluée et géographie se conjuguent pour expliquer l’attractivité de la Chine aux yeux des multinationales asiatiques et occidentales.

Proche du Japon, de la Corée du Sud ou de Taïwan, la Chine sert de plateforme d’exportation à ces pays pour atteindre les marchés européens ou américains. Réciproquement, l’Occident se délocalise en Chine pour assembler les produits qu’il projette de vendre en Asie.

Ce commerce vertical et triangulaire témoigne du fait que l’atelier du monde importe à proximité pour vendre au loin et importe de loin pour vendre à proximité.

L’étude de la Banque mondiale est  une nouvelle pièce à verser au débat sur la complémentarité entre mondialisation et régionalisation des échanges.

DG

La Chine serait plus riche et moins ouverte qu’on ne le pense


Le PIB chinois est très supérieur aux chiffres les plus diffusés.

Deux éléments conduisent mathématiquement à réduire le montant du PIB chinois en dollars: la sous évaluation du yuan et le faible prix des produits qui appartiennent au secteur abrité de la concurrence étrangère.

Par exemple, une coupe de cheveux est très abordable du côté de Canton, puisque le coiffeur local y passe autant de temps que son homologue parisien, mais pour un salaire horaire beaucoup plus faible. C’est ce qu’on appelle l‘effet Balassa. Il nous aide à comprendre pourquoi le niveau de vie progresse au ralenti dans les pays riches (parce que le prix des services à faible productivité grimpe en flèche par rapport à celui des biens industriels) et pourquoi les gens s’irritent de plus en plus souvent contre les fonctionnaires, jugés trop nombreux, trop chers etc… mais je m’égare.

Pour être au plus près du niveau de vie réel, on doit exprimer la richesse chinoise en prix internationaux (techniquement, avec un  taux de change à parité de pouvoir d’achat).

Résultat: le PIB est 4 fois plus élevé que les chiffres courants.

Cela modifie profondément la valeur du ratio d’ouverture (exportations/PIB), qui semblait atteindre 40% en 2008.

Selon les  sources, le taux d’ouverture réel se situait, à la fin des années 90, entre 5% (Maddison  2001) et 8% (J. L Combes).

A l’heure actuelle, d’après le CIA world factbook, il avoisinerait 15%, soit  la moitié du taux officiel et l’équivalent du taux d’ouverture de l’Union Européenne.

Le blog Random Economist a calculé  que l’excédent commercial représentait 2,7% du PIB chinois en 2007 et non pas 10%.

D’après l’auteur, la croissance économique chinoise dépend autant de la demande étrangère  que l’Allemagne.

DG

Pourquoi la Chine devrait importer plus

Intéressante tribune de l’économiste Yo Yang, qui propose aux autorités chinoises qu’elles abaissent les barrières douanières sur les biens de consommation afin de combattre les poussées inflationnistes.

Il a deux arguments:

  • La Chine ne possède pas d’avantages comparatifs dans nombre de produits de consommation occidentaux haut de gamme. Elle pourrait donc les importer à meilleur prix, sans effet catastrophique sur l’emploi local.
  • Les restrictions sur les importations entretiennent un excédent commercial artificiel et des entrées massives de devises  qu’il coûte très cher de canaliser pour qu’elles ne provoquent pas d’inflation. En effet, la Chine s’efforce de retirer ces liquidités du marché intérieur en vendant des bons gouvernementaux sur lesquels elle paie des taux d’intérêt plus élevés que ceux que lui servent ses placements  en bons du trésor américains.

DG

La Chine perdrait son avantage compétitif dans 7 ans

En voilà une surprise.

Patrick Artus prédit que, d’ici dix ans, la Chine et les autres pays émergents vont perdre leur avantage de compétitivité par rapport  à la zone euro et aux Etats-Unis.

L’appréciation de leurs devises et la montée des coûts salariaux unitaires (+7% par an en Chine) devraient faire leur office.

Pour bâtir sa démonstration, l’auteur suppose que les coûts salariaux occidentaux n’augmenteront pas à cause de la crise.

Est-ce une conjecture ou un message subliminal?

DG

1870-2050: la longue marche de la Chine

En 2050, la Chine devrait occuper la première place en termes de PIB et l’Inde pèserait presque autant que l’Europe.

Avec un recul de deux siècles, on se rend compte qu’il ne s’agit pas d’une incongruité historique.

En effet, la Chine se hissera au rang qui aurait été le sien si le dynamisme des années 1870-1890 avait continué sur sa lancée.

Voilà une belle revanche sur l’humiliation provoquée par les interventions militaires occidentales à la fin du XIXième siècle.

L’Europe  ne s’effondre pas, mais poursuit son déclin séculaire.

Quant aux Etats-Unis, ils retrouveraient leur poids de 1890. Cette année là, on proclamait officiellement la fin de la frontière, c’est-à-dire du front de colonisation.

DG

Le bonheur est une idée neuve en Chine

Happy House (Siouxie and the Banshees, 1981)

La Chine serait-elle en train d’ abandonner le culte du PIB?

Voici que le XIIIième plan quiquennal chinois se donne comme objectif non plus la croissance maximum mais le bien-être de la population .

Désormais, il faudra penser à mieux répartir le revenu, améliorer la qualité des services publics et porter une plus grande attention à l’environnement.

Le site Eco Infos Monde nous donne quelques détails sur ce grand bon en avant:

Le ministre des finances, Xie Xuren, a  affirmé, qu’en 2011, les deux-tiers du budget du pays seront utilisés pour l’amélioration des conditions de vie du peuple.
Le plan quinquennal ne fixe plus, de son côté, d’objectifs précis de hausse annuelle du PIB (les fameux 8%) mais indique une volonté d’atteindre globalement, sur les cinq ans à venir, une hausse aux alentours de 7% par an.
Et Newsweek d’expliquer que, «récemment, le gouvernement chinois a recommencé à réfléchir à l’objectif final du développement économique et la notion de l’indice du BNB (Bonheur national Brut) est abordée de plus en plus fréquemment dans les rapports de travail (…). L’indice du BNB est devenu une orientation politique, la priorité étant de la transformer en action mobilisant la force de toute la société (…)
En parcourant le dernier rapport du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), on s’aperçoit que le succès de Chine en matière de développement humain est biaisé puisque l’éducation et la santé peinent à suivre à l’envol du PIB:
Les « 10 pays les plus performants » mis en évidence dans le Rapport 2010 – ceux qui, parmi les 135, ont le plus progressé en termes d’IDH au cours des 40 dernières années – avaient à leur tête l’Oman qui, au fil des décennies, a investi ses revenus de l’énergie dans l’éducation et la santé publique  Les neuf autres « pays les plus performants » sont la Chine, le Népal, l’Indonésie, l’Arabie saoudite, le Laos, la Tunisie, la Corée du Sud, l’Algérie et le Maroc.Fait étonnant, la Chine était le seul pays à faire partie de la liste des « 10 plus performants » en raison uniquement de sa performance dans la dimension monétaire. (PNUD)
DG